Au cours de la messe de 11h, le dimanche 26 septembre 2021, le P. Emmanuel, curé, a fait l’homélie suivante.
Trame de l’homélie du P. Emmanuel (curé)
Ah si seulement…
« Si, toi –insiste bien le Christ – tu ne prends pas sérieusement les moyens de te garder du péché, tu t’en iras ‘dans la géhenne là où le ver ne meurt pas et où le feu ne s’éteint pas !’. » Si j’avais pu choisir l’Évangile pour une messe de rentrée paroissiale, je n’aurais pas spontanément retenu celui-ci. Mais, selon les paroles du Psaume, nous savons que la Parole de Dieu « est parfaite qui redonne vie ; la charte du Seigneur est sûre, qui rend sages les simples. »
Une phrase des lectures de ce dimanche résonne particulièrement dans mon cœur de curé ce matin : « Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes ! Si le Seigneur pouvait mettre son esprit sur eux ! » (cf. 1ère lecture). Nous sommes au chapitre 11 du livre des Nombres ; Moïse est écrasé par la mission qui est la sienne et se choisit 70 collaborateurs ; Dieu envoie alors son Esprit Saint sur chacun d’entre eux, y compris sur les 2 hommes qui étaient absents à la convocation devant la Tente de la rencontre ; cependant, devant la réaction jalouse et étroite de Josué, Moïse exprime son aspiration qu’un jour chaque membre du peuple, sans exception, soit animé par l’Esprit prophétique. Pour ma part, comme tout curé, je rêve que chacun d’entre nous se laisse conduire pleinement par l’Esprit qu’il a reçu au jour de son baptême et de sa confirmation. Ce sera ma prière de conclusion.
L’intérieur et l’extérieur, les disciples et la foule
Avant d’y parvenir, je voudrais m’arrêter avec vous sur un point de ces lectures qui concerne les limites du groupe des disciples. Nous pourrions dire : les frontières du Corps du Christ qui est l’Eglise. Depuis 2 semaines, l’Évangile de Marc met en avant l’écart subsistant entre les apôtres et l’Evangile. Il existe un premier écart entre la pensée de Pierre au sujet du Messie – une pensée bien trop humaine – d’une part et la pensée de Dieu qui est celle d’un Messie empruntant résolument le chemin de la Passion d’autre part (cf. Mc 8,32). Il existe un second écart entre la manière dont les apôtres conçoivent l’organisation de leur groupe en s’interrogeant sur celui qui est le plus grand d’une part et le chemin d’humilité que Jésus indique d’autre part (cf. Mc 9,35).
Il existe enfin un troisième écart que nous découvrons aujourd’hui et qui concerne l’action de Dieu et l’exercice du pouvoir que les apôtres ont reçu en partage. Lorsqu’ils ont été appelés par Jésus, ils ont effectivement « reçu le pouvoir d’expulser les démons » (Mc 3,15) et voilà qu’à la manière de Josué au temps de Moïse, l’apôtre Jean se scandalise que d’autres personnes, qui ne font pas partie du groupe des disciples de Jésus, pratiquent eux aussi des exorcismes. Or, s’ils expulsent les démons, c’est qu’effectivement l’Esprit de Dieu agit à travers ces inconnus (cf. Mc 3,23). C’est d’autant plus frustrant pour les apôtres qu’eux-mêmes, peu de temps avant, ne sont pas parvenu à faire un exorcisme sur un enfant épileptique (cf. Mc 9,28-29) ! Jésus leur répondit alors : « Cette espèce de démon, rien ne peut la faire sortir, sauf la prière. »
Les frontières de ce qui deviendra l’Église semblent donc floues : à l’intérieur du groupe, les disciples ne parviennent pas encore à prier avec foi, tandis qu’à l’extérieur certains font des miracles « au nom de Jésus ». Ce n’est pas tout. A l’intérieur du groupe, parce que les disciples ne sont pas encore convertis, Jésus met en garde contre de graves « scandales » qui éloigneraient de Jésus les plus faibles ; quelques années plus tard, au sein de la première communauté chrétienne, nous laisse entendre saint Jacques (cf. 2ème lecture), il y a de fait des situations scandaleuses : des riches vivent dans l’insouciance, en ignorant leurs frères les plus indigents… c’est-à-dire comme s’ils les avaient « tué » dans leur cœur, ce qui leur vaudra un sévère jugement. Or, pendant ce temps, à l’extérieur de l’Église, voilà que certains ont un coeur bon qui les pousse à agir avec délicatesse, à même offrir un verre d’eau aux chrétiens dont ils croisent la route, ce qui leur vaudra une récompense.
Une chose est sûre, Dieu, lui, agit avec une grande générosité que méconnaît encore l’apôtre Jean. Comme le semeur sème largement, y compris sur le bord du chemin et sur les rochers, ainsi Dieu répand-il ses dons en surabondance, sans se limiter. Son Amour n’a pas de limite, ou plutôt il a une unique limite, celle que nous mettons.
Si les frontières entre l’intérieur et l’extérieur du groupe des disciples sont ainsi bousculées par Jésus, il n’en reste pas moins qu’il y a bien un intérieur et un extérieur. Ceux qui ont été appelés à entrer l’intérieur de la « maison » (cf. Mc 1,29; 2,1; 3,20… ), avec toutes leurs fragilités et leur péchés, ont le privilège d’être « avec Jésus ». Ils ont le privilège de faire partie de la Famille des disciples de Jésus. Ce privilège immérité est une responsabilité, une mission vis-à-vis de la foule qui, elle, est encore à l’extérieur, qui connait parfois le nom de Jésus mais ne s’est pas encore mise à sa suite. Comme je l’ai écrit dans l’éditorial de la feuille paroissiale, si un sondage récent révèle qu’une majorité de français ne croient plus en Dieu, il nous permet aussi d’estimer à 20 millions le nombre de ceux qui seraient prêt à ce que des chrétiens les accueillent et prient pour eux ! Voilà notre mission. Cela risque de nous prendre quelques journées !
Choisir de faire partie de la Famille de la paroisse de la Trinité pour une nouvelle année
En ce dimanche de rentrée, nous sommes à l’intérieur de l’église de la Trinité. Je voudrais vous poser cette question : à Paris, il y a de nombreux lieux pour apprendre à suivre le Christ et faire l’expérience de l’Eglise, mais vous qui êtes-ici, choisissez-vous de faire partie de la « Famille de la Trinité » pour cette nouvelle année qui s’ouvre ? Je ne vous demande pas : avez-vous une vie conforme à l’Evangile ? Ni : est-ce que vous êtes déjà formés ? Ni : êtes-vous humainement solides ? Je vous demande seulement : choisissez-vous (ou rechoisissez-vous) de cheminer cette année au sein de notre Famille ?
Frères et soeurs, il est impossible d’être pleinement chrétien et de le demeurer, sans expérimenter concrètement que nous faisons partie d’une même famille. C’est sans doute pour avoir été par trop infidèles à cette vérité au fil des dernières décennies que beaucoup ont déserté l’Eglise pour rejoindre d’autre lieux qui, finalement, s’avèrent incapables de combler les aspirations de leurs cœurs d’hommes et de femmes.
Frères et sœur, au milieu de l’Eglise du Christ qui est à Paris, nous formons ici un seul Corps au sein duquel nous pouvons grandir personnellement et ensemble. Selon les mots de l’épître aux Ephésiens, ce « corps se construit dans l’amour » ; « par le Christ, dans l’harmonie et la cohésion, tout le corps poursuit sa croissance, grâce aux articulations qui le maintiennent, selon l’énergie qui est à la mesure de chaque membre » (Ep 4).
Dans ce corps, chacun a sa place, unique, irremplaçable. C’est parce qu’il était seul, écrasé par sa charge de pasteur, que Moïse a d’abord appelé 70 collaborateurs avant de rêver qu’un jour chaque membre du peuple, sans exception, ait part à l’Esprit de Dieu pour servir, pour prophétiser, pour prendre soin les uns des autres, pour témoigner auprès de ceux qui ne font pas encore partie du peuple de Dieu. En cette messe de rentrée, j’ai un rêve. Je rêve que beaucoup se reconnaîtront comme appelés à sortir de la foule et choisiront de faire partie de la Famille de la Trinité.
Dans notre Famille paroissiale, notre ambition…
Dans notre Famille paroissiale, notre ambition est que personne ne vienne ici sans être accueilli, objectif que je nous assignais il y a 3 ans, en nous proposant notamment ce petit moyen du « partenaire de prière », cette salutation toute chrétienne et cet échange d’intention de prières au début de chaque messe.
Dans notre Famille, notre ambition est d’offrir à chacun la possibilité de progresser à son rythme dans la connaissance du Christ et la découverte de sa vocation, raison pour laquelle j’ai initié ces parcours sur 4 niveaux, marquant comme autant d’étapes la progression dans la vie chrétienne. Près de 600 personnes différentes ont suivi un tel parcours.
Dans notre Famille, notre ambition est d’offrir à chacun la possibilité de faire l’expérience concrète de la fraternité au sein d’un petit-groupe ; et pour que ceux qui ne pourraient pas s’engager toute les semaines ne soit pas exclus de cette expérience, nous lançons cette année des fraternités paroissiales mensuelles : 8 rencontres dans l’année, à domicile, autour de la Parole de Dieu.
Dans notre Famille, notre ambition est d’être les pieds et les mains du Christ, ses oreilles et sa bouche (cf. Evangile), pour visiter, aider, écouter et consoler ceux qui sont marginalisés ou portent de lourds fardeaux. Vous le savez bien il y a ici de très nombreuses possibilités de service.s
Enfin, dans notre Famille, notre ambition est d’offrir au plus grand nombre la possibilité de servir autour de la messe, le dimanche, le jour de la résurrection. Parce qu’il appartient à la vocation de chaque chrétien de servir de quelque manière, je souhaiterais d’ailleurs qu’on cesse de parler de « bénévoles » sur la paroisse, comme si cela était une option réservée à quelques bonnes âmes. Non, chaque disciple du Christ est fondamentalement un disciple-serviteur, qui met son temps, ses talents et ses charismes au service de la croissance du corps entier. Chacun évidemment selon sa condition physique, son état de vie, sa vie professionnelle et familiale.
[L’équipe d’accueille distribue une carte à remplir pendant un temps de silence] Nous vous distribuions maintenant une carte que je vous invite à recevoir comme vous étant proposée par le Christ lui-même. Elle esquisse ce que pourrait être votre chemin cette année… pour votre joie et la nôtre à tous. Si vous le souhaitez, car nul n’y est obligé, vous pouvez la compléter dès maintenant et la remettre tout à l’heure dans le panier de quête ; pourrez aussi la remettre à la fin de la messe à des membres de l’équipe d’accueil ou à un prêtre.
Ah si seulement…
« Ah ! Si le Seigneur pouvait répandre en surabondance son esprit sur chacun des paroissiens de la Trinité, ceux ici présents et les quelques absents ! » Viens Esprit de Sainteté…
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PREMIÈRE LECTURE
« Serais-tu jaloux pour moi ? Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes ! » (Nb 11, 25-29)
Lecture du livre des Nombres
En ces jours-là,
le Seigneur descendit dans la nuée
pour parler avec Moïse.
Il prit une part de l’esprit qui reposait sur celui-ci,
et le mit sur les 70 anciens.
Dès que l’esprit reposa sur eux, ils se mirent à prophétiser,
mais cela ne dura pas.
Or, deux hommes étaient restés dans le camp ;
l’un s’appelait Eldad, et l’autre Médad.
L’esprit reposa sur eux ;
eux aussi avaient été choisis,
mais ils ne s’étaient pas rendus à la Tente,
et c’est dans le camp qu’ils se mirent à prophétiser.
Un jeune homme courut annoncer à Moïse :
« Eldad et Médad prophétisent dans le camp ! »
Josué, fils de Noun, auxiliaire de Moïse depuis sa jeunesse,
prit la parole :
« Moïse, mon maître, arrête-les ! »
Mais Moïse lui dit :
« Serais-tu jaloux pour moi ?
Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple
un peuple de prophètes !
Si le Seigneur pouvait mettre son esprit sur eux ! »
– Parole du Seigneur.
PSAUME
(Ps 18 (19), 8, 10, 12-13, 14)
R/ Les préceptes du Seigneur sont droits,
ils réjouissent le cœur. (Ps 18, 9ab)
La loi du Seigneur est parfaite,
qui redonne vie ;
la charte du Seigneur est sûre,
qui rend sages les simples.
La crainte qu’il inspire est pure,
elle est là pour toujours ;
les décisions du Seigneur sont justes
et vraiment équitables.
Aussi ton serviteur en est illuminé ;
à les garder, il trouve son profit.
Qui peut discerner ses erreurs ?
Purifie-moi de celles qui m’échappent.
Préserve aussi ton serviteur de l’orgueil :
qu’il n’ait sur moi aucune emprise.
Alors je serai sans reproche,
pur d’un grand péché.
DEUXIÈME LECTURE
« Vos richesses sont pourries » (Jc 5, 1-6)
Lecture de la lettre de saint Jacques
Vous autres, maintenant, les riches !
Pleurez, lamentez-vous
sur les malheurs qui vous attendent.
Vos richesses sont pourries,
vos vêtements sont mangés des mites,
votre or et votre argent sont rouillés.
Cette rouille sera un témoignage contre vous,
elle dévorera votre chair comme un feu.
Vous avez amassé des richesses,
alors que nous sommes dans les derniers jours !
Le salaire dont vous avez frustré les ouvriers
qui ont moissonné vos champs,
le voici qui crie,
et les clameurs des moissonneurs
sont parvenues aux oreilles du Seigneur de l’univers.
Vous avez mené sur terre une vie de luxe et de délices,
et vous vous êtes rassasiés
au jour du massacre.
Vous avez condamné le juste et vous l’avez tué,
sans qu’il vous oppose de résistance.
– Parole du Seigneur.
ÉVANGILE
« Celui qui n’est pas contre nous est pour nous. Si ta main est pour toi une occasion de chute, coupe-la » (Mc 9, 38-43.45.47-48)
Alléluia. Alléluia.
Ta parole, Seigneur, est vérité ;
dans cette vérité, sanctifie-nous.
Alléluia. (cf. Jn 17, 17ba)
Évangile de Jésus Christ selon saint Marc
En ce temps-là,
Jean, l’un des Douze, disait à Jésus :
« Maître, nous avons vu quelqu’un
expulser les démons en ton nom ;
nous l’en avons empêché,
car il n’est pas de ceux qui nous suivent. »
Jésus répondit :
« Ne l’en empêchez pas,
car celui qui fait un miracle en mon nom
ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi ;
celui qui n’est pas contre nous
est pour nous.
Et celui qui vous donnera un verre d’eau
au nom de votre appartenance au Christ,
amen, je vous le dis,
il ne restera pas sans récompense.
Celui qui est un scandale, une occasion de chute,
pour un seul de ces petits qui croient en moi,
mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou
une de ces meules que tournent les ânes,
et qu’on le jette à la mer.
Et si ta main est pour toi une occasion de chute,
coupe-la.
Mieux vaut pour toi entrer manchot dans la vie éternelle
que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux mains,
là où le feu ne s’éteint pas.
Si ton pied est pour toi une occasion de chute,
coupe-le.
Mieux vaut pour toi entrer estropié dans la vie éternelle
que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux pieds.
Si ton œil est pour toi une occasion de chute,
arrache-le.
Mieux vaut pour toi entrer borgne dans le royaume de Dieu
que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux yeux,
là où le ver ne meurt pas
et où le feu ne s’éteint pas. »
– Acclamons la Parole de Dieu.